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Le cinquième et dernier obstacle à la pratique de la méditation pleine conscience après le plaisir des sens, la colère, la torpeur et l’agitation est le doute.

Qu’est-ce que le doute ?

Il ne s’agit pas ici du “doute raisonnable” – qui est forme de pensée critique basée sur l’expérience, qui est indispensable à toute pratique saine et constructive, et qui amène par exemple des questions : sur la façon de bien faire ou de ne pas mal faire les choses ; sur les effets parfois inattendus de la pratique de la méditation pleine conscience ; sur le “qu’en dira-t-on autour de moi“ ; sur le “et si ça ne marchait pas pour moi” ; sur le “vais-je y arriver”, etc.

Toutes ces questions et d’autres sont légitimes, saines et naturelles.

Et même si nous savons qu’elles peuvent troubler la clarté de notre esprit en ajoutant de l’agitation supplémentaire à un état initial déjà souvent perturbé, ces interrogations sont normales au début de la pratique.

La sorte de doute qui fait obstacle à la pratique de la méditation concerne plutôt une attitude de doute extrême, captive du scepticisme ou de l’indécision. C’est une forme de doute non-raisonné. C’est une sorte de pensée conceptuelle et erronée, basée sur une appréhension qui nous éloigne de nous-mêmes et de la pratique de la méditation pleine conscience.

Cette façon de douter nous conduit à remettre en question, par exemple :

  • notre propre capacité à changer quelque chose dans notre vie,
  • l’intérêt véritable de la méditation,
  • la qualité de “notre guide” ou de “notre enseignant”,
  • la méthode enseignée,
    etc.

Cette attitude sceptique et indécise nous amène à perdre confiance en nous-mêmes. Elle génère des conflits internes et externes et remet en question notre engagement dans la pratique en nous plaçant dans une forme d’hésitation persistante. On demande alors à être convaincu et même lorsque les preuves sont là on trouve mille raisons de “ne pas y croire”, de “contre-argumenter”, de “ne plus s’impliquer”.

La difficulté à prendre des décisions, la confusion, le retrait, la procrastination, le déracinement, la passivité ou la rigidité sont autant de manifestations de ce type de doute.

Autrement dit, nous n’arrivons plus à avancer ou, pire, nous ne voulons plus progresser sur le chemin. Un sentiment de blocage paralyse tout souhait éventuel de persévérance dans la pratique. En creusant, nous découvrirons peut-être que ce doute non-raisonné repose sur un affect inconscient de peur, de frustration ou de culpabilité.

Le doute nous pousse vers les quatre obstacles précédents

Lorsqu’il se présente, cet obstacle du doute non-raisonné aura aussi tendance à nous précipiter face à l’une des quatre entraves précédentes : le plaisir des sens, la colère, la torpeur et l’agitation.

Il est évidemment impossible de contrôler tous les aspects de notre vie qui nous poussent vers ces obstacles car beaucoup de choses ne dépendent pas que de nous. Apprendre à trouver l’équilibre, à lâcher-prise, à cultiver un certain sens de l’intégrité sont autant d’aspects nécessaires à notre paix intérieure.

Plus que dans nos circonstances elles-mêmes, notre véritable liberté réside dans notre capacité à choisir à chaque instant comment nous accueillons et répondons à nos circonstances.

Alors il peut être utile de nous interroger sur la place que le doute tient dans notre vie et, surtout, sur notre façon personnelle de douter et de questionner notre propre pratique de la méditation pleine conscience.

Une conclusion au sujet de la simplicité et des 5 obstacles

Leonard de Vinci, qu’on peut difficilement qualifier de simpliste, écrit que “la simplicité est la sophistication suprême”.

Et j’ajoute que c’est sans doute, aussi, l’un des secrets du bonheur : car lorsque les choses sont trop complexes, elles deviennent moins accessibles et moins compréhensibles.

Or le bonheur habite le chemin de la simplicité. C’est pour cette raison qu’il est utile de commencer la pratique de la méditation par ce qui est évident et facile et c’est aussi par cela qu’il faut terminer.

Juste avant de mourir, Siddhartha Gautama, dit le Bouddha, laissa, dit-on, cette dernière instruction à ses disciples : faites tout votre possible, inlassablement, en étant à tout moment attentifs, présents et conscients.

2.500 ans après, ce conseil paraît encore si simple qu’il peut très bien ne pas être pris au sérieux. Nous nous imaginons qu’il doit bien y avoir quelque de plus élaboré, de plus complexe à mettre en œuvre. Sinon, ça serait beaucoup trop simple et trop facile !

Mais cette façon de penser peut venir d’un certain manque d’expérience qui confond simplisme et simplicité. Car dès que l’on pratique on réalise à quel point le fait d’être attentif, présent et conscient n’est pas si évident qu’il parait.

Mais si le doute et le manque d’expérience prennent l’ascendant sur la pratique concrète, cela nous conduit dans le scepticisme et l’indécision. S’ensuit l’absence de motivation pour pratiquer et, par conséquent, de toute possibilité d’acquérir l’expérience à même de démontrer concrètement la puissance de l’attention, de la présence et de la conscience à l’instant présent.

Autrement dit, c’est exactement le même processus qui est en jeu lorsqu’un enfant déclare qu’il n’aime pas un plat alors qu’il ne l’a même pas goûté.

Le manque d’attention est en grande partie lié aux cinq obstacles et les pratiquants sont en général perturbés par le plaisir des sens, la colère, la torpeur, l’agitation et le doute. Or une personne qui ne fait pas tout son possible pour être attentive dans son quotidien, ne peut pas avoir l’esprit clair. Pourquoi ?

Tout simplement parce qu’elle n’est jamais réellement consciente de la nature de ses propres émotions et de ses propres pensées : ce que j’appelle le roi des bavards agit en elle, en toute impunité, et son influence néfaste lui échappe totalement. Elle agit en mode zombie.

C’est vraiment par la pratique régulière, inlassable, de la méditation pleine conscience, que nous pouvons constater si notre esprit est clair ou non, s’il est libre du désir, de la colère, de la paresse, de l’inquiétude, de la passivité, etc.

Toute personne qui fait de sa pratique un style de vie devient petit à petit plus consciente des sensations, émotions et pensées désagréables qui ont tendance à embrouiller son esprit de façon compulsive et qui entraînent l’irritation. Tandis qu’elle accueille, sans les juger, les tensions et les douleurs, elle réalise la nature impermanente des sensations et des émotions agréables, désagréables et neutres.

C’est cet examen régulier de ce qui l’anime – cet entrainement de l’attention – qui l’aide à “purifier son esprit de ses impuretés” ou, si vous préférez, à dépasser les cinq obstacles de la pratique.

En exerçant son aptitude naturelle à être attentive, présente et consciente – instant après instant, au fil du temps et de la pratique – elle développe le bon équilibre dans lequel peut s’épanouir l’amour inconditionnel envers elle-même, envers tous les êtres et envers la Vie.

 

Jean-Marc Terrel
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